Deux expositions, deux approches du temps
Par Les Amis de Vézelay • 13 déc, 2008 • Catégorie: Bulletin n°65, Le billet de la présidenteEn l’espace de six mois, les Amis de Vézelay, par le biais de deux expositions, auront plongé leur public dans deux approches du temps. Le temps long, par la présentation, en novembre à la maison Jules-Roy, des remarquables aquarelles et dessins de l’architecte Germain Debré sur la Grande Guerre et des lieux qu’il a été amené à traverser. Des hommes, des camarades qu’il a côtoyés, à l’arrière et au front. Des paysages apaisants, retenus au vol. Mais aussi des plaines désolées où courent des escouades éparses. La lassitude et la tristesse de tant de combattants, embarqués dans une guerre qu’ils doivent mener, mais dont ils n’en peuvent plus.
Cette belle succession d’images côtoyait quelques lettres de combattants vézeliens – les Papillon, Raymond Simon – qui rappelaient au public la vie des tranchées : les intempéries, le froid, l’eau jusqu’aux genoux, la boue, les poux, les pluies d’obus, la mort des copains… Double écho d’une même réalité, où le fait d’écrire ou de peindre et dessiner est déjà un moyen de surmonter la souffrance du quotidien, d’exister en quelque sorte dans le déchaînement de la violence et de la mort. Ce double témoignage relève du miracle et du tragique : la voix des hommes – le temps s’étant arrêté – réentendue tantd’années plus tard. Le passé rendu au présent, le temps retrouvé.
Le temps court. C’est celui de l’expérience que nous avons tentée avec un photographe professionnel, le Danois Erling Mandelmann, consistant à faire le portrait du plus grand nombre possible de Vézeliens, en quelques semaines. Le tout sera présenté à la Salle gothique, du 30 avril au 15 mai 2009. Visages d’hommes et de femmes solidement ancrés sur la colline ou plus fugitifs, plus nomades. Jeunes ou retraités. Commerçants ou religieux. Gens du haut ou du bas. Bourgeois ou milieux modestes. L’entreprise relève davantage du reportage que du portrait d’art. Pas de longues poses, priorité à l’éclairage naturel. Hommes et femmes dans leur cadre quotidien.
Dans vingt, dans cinquante ans, cet étonnant ensemble de regards (pour autant qu’il soit conservé) pourrait bien être à son tour un irremplaçable témoignage sur un moment précis de l’histoire de notre ville. « Nous voilà, diront-ils, c’est ici que nous avons vécu ! »
Madeleine Bosshard